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Le multi partenariat sexuel chez les conducteurs de motos-taxis

Les contributions qui suivent ont été collectées sur le terrain par les 06 Experts du projet MOVIHCAM dans les villes suivantes : Bertoua, Bafoussam, Batouri, Douala, Kribi, N’Gaoundéré. Sur le thème ‘Multipartenariat’,  il a été demandé aux experts d’interviewer des conducteurs de motos-taxis, des collègues de conducteurs de motos-taxis, des tenanciers de gargotes et buvettes, des amies, copines de conducteurs de motos-taxis afin de relever les principales habitudes et pratiques des conducteurs de motos-taxis en matière de sexualité. Les informations collectées permettent de mettre en évidence les principales tendances qui se dégagent (et qui très souvent se rejoignent) au sein d’une même population cible dans différents lieux géographiques. Ce document pourra ainsi contribuer à apporter des éléments de compréhension et fournir des arguments aux personnes, en particulier les pairs éducateurs, qui travaillent sur le terrain afin de donner des recommandations aux conducteurs de motos-taxis quant à l’importance du port systématique et correct du préservatif.

La tendance principale qui se dégage est un multi partenariat avéré chez les conducteurs de motos-taxis, qu’ils expliquent par de nombreuses rencontres quotidiennes dues à la pratique du métier, leur pouvoir d’achat pour les cibles telles que les jeunes filles, lycéennes ou étudiantes et un usage systématique du préservatif avec les professionnelles de sexe mais une très grosse réticence surtout avec les copines régulières.

DETAIL DES REPONSES DONNEES

A la question « que pensez-vous du multi-partenariat sexuel chez les conducteurs de motos taxis de votre localité », les réponses convergent. Le multi partenariat est une réalité chez les conducteurs de motos-taxis (Douala, Batouri, Bafoussam, Kribi, Bertoua). Malgré une forte mobilisation et sensibilisation en direction de ces derniers, ils demeurent des personnes à risque (Batouri). Car, leur métier les prédispose à de nombreuses rencontres (Douala, Bafoussam, Kribi, Bertoua). Cependant, c’est surtout leur pouvoir d’achat qui leur donne la possibilité de se faire draguer par leurs clientes (Kribi), mais aussi d’avoir des jeunes filles, des lycéennes ou des étudiantes comme petites amies et/ou copines régulières (Douala). Des petites amies ou copines régulières pour lesquelles ils subviennent, en contrepartie, facilement aux besoins en termes de transport pour se rendre à l’école en l’occurrence ou encore en termes d’argent de poche (Douala).

Quand on demande « si les conducteurs de motos-taxis acceptent-ils facilement ou difficilement d’évoquer ce sujet », les réponses sont mitigées. Quand les célibataires en parlent, c’est pour affirmer que ça leur donne encore l’opportunité ou l’occasion de jouir de leur jeunesse et de leur liberté (Batouri, Ngaoundéré). Pendant que pour les hommes mariés, cela relève de la vie privée. Quand ils leur arrivent d’en parler, c’est notamment pour partager leurs exploits avec leurs femmes et quelques fois avec leurs petites (Bafoussam, Kribi, Bertoua). De fait, même si c’est une réalité indéniable de leur quotidien (Bertoua), la religion entretient encore beaucoup de tabous autour du sujet et c’est l’une des raisons pour lesquelles les gens n’aiment pas en parler.

Alors que lorsqu’ils évoquent leur rapport aux femmes, on constate bel et bien que les conducteurs de motos-taxis « aiment et cherchent » beaucoup les filles (élèves, étudiantes en général très jeunes, innocentes et/ou naïves) aux femmes (femmes plus matures en termes d’âge et ayant beaucoup d’expérience en amour) car, elles sont plus faciles à avoir (Douala, Bafoussam, Kribi, Bertoua, Batouri, Ngaoundéré). Même si pour certains, ce ne sont pas eux qui choisissent (Kribi), mais plutôt elles qui les abordent (Bafoussam) et leur facilite ainsi la tâche, déclarent-ils. De ce fait, ils peuvent avoir entre trois et quatre filles régulières ou non (Batouri, Bafoussam, Douala). Et ceci même par jour s’ils le veulent (Bafoussam).

En ce qui concerne leurs stratégies et plans pour avoir des partenaires sexuelles occasionnelles, l’argent occupe une place de choix (Douala, Batouri, Bafoussam, Bertoua, Kribi). Ensuite, viennent la gratuité de transport (Douala, Batouri, Bafoussam, Bertoua), la drague du conducteur (Batouri, Bafoussam, Kribi, Bertoua) et enfin la drague de la cliente (Batouri, Bertoua, Kribi, Bafoussam). Dans aucun des cas, la violence n’est utilisée pour obtenir une partenaire occasionnelle.

Quant à leurs partenaires sexuelles réelles, les élèves sont au premier plan (Douala, Batouri, Kribi, Bafoussam, Bertoua). Viennent ensuite les professionnelles de sexe (Douala, Batouri, Kribi, Bertoua, Bafoussam), les vendeuses (Douala, Batouri, Kribi, Bertoua), les couturières et call boxeuses (Batouri, Kribi, Bertoua), les coiffeuses (Batouri, Kribi). Très peu de femmes mariées sont leurs partenaires réelles (Kribi).

Cependant, quand ils parlent de leurs compagnes occasionnelles régulières et du rapport à la fidélité, pour certains, ils disent que ces filles sont des « roues de secours » (Douala) même si certains pensent qu’elles leur sont fidèles, car ils savent les entretenir (Douala, Batouri). Pendant que d’autres affirment que les femmes fidèles, on les met à la maison (Kribi) ou que la fidélité n’est plus de ce monde (Bafoussam).

Quand on aborde la notion de fidélité avec les conducteurs de motos-taxis, les opinions sont très relatives. Pour certains, être fidèles c’est avoir une seule partenaire (Batouri) ou encore c’est quand leur épouse ne les a pas surpris en train de faire l’amour à une autre femme qu’elle (Kribi) ou encore c’est quand ils vivent dans une même maison avec leur partenaire (Douala) ou quand ils sont réguliers chez plusieurs partenaires (Bertoua).

Au sujet de la prise de précautions en matière d’usage du préservatif avec ces partenaires, ils révèlent qu’en général, ils utilisent systématiquement le préservatif avec les professionnelles de sexe et des conquêtes diverses (Bertoua, Ngaoundéré). Cependant, quand ils se mettent en couple, épousent ces filles  ou quand elles deviennent titulaires ou régulières, ils n’ont plus recours au préservatif en mettant en avant l’argument de la confiance (Bafoussam, Kribi, Douala, Batouri, Bertoua).

Par ailleurs, pour négocier le préservatif avec ces filles, tout dépend comme ils le disent du dossier en face et de la relation que le conducteur entretient avec la fille (Bafoussam). Avec une professionnelle de sexe, cela ne se négocie pas ; l’usage du préservatif est systématique (Bafoussam). Quand il s’agit de la copine régulière, c’est un peu difficile, car l’usage du préservatif est perçu comme une preuve d’infidélité (Kribi). Ils avouent aussi que l’argent et les cadeaux sont des arguments de poids pour négocier le non port du préservatif (Bafoussam).